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Versailles au temps des rois

   
Auteur : G. Lenotre
Editeur : Grasset, collection « Les cahiers rouges »
Date de dépôt : mai 2006

La collection « Les cahiers rouges » des éditions Grasset créée en 1983 regroupe des écrits avec pour point commun la passion d'aimer, de voyager, du crime, de vivre...
Parmi les auteurs retenus figurent notamment Charles Baudelaire, Blaise Cendrars, Jean Cocteau, Charles Dickens, Alexandre Dumas, Umberto Eco, Maurice Genevoix, Jean Giono, Pascal Jardin, André Malraux, Gérard de Nerval, Vita Sackville-West, Stefan Zweig, mais aussi G. Lenotre. Ce dernier, de son vrai nom Théodore Gosselin (1857-1935), est historien et académicien (1932). Il prit pour nom de plume « G. Lenotre ». Ce « G », comme il le disait lui-même, « ne signifie ni Georges, ni Guy, ni Gaston, ni même Gédéon, comme certains le croient et le disent, mais tout simplement Gosselin, qui est mon nom de contribuable. ». Quant au « Lenotre » (en un seul mot et sans accent circonflexe), il est inspiré de son arrière-grand-oncle, le jardinier André Le Nôtre. Il est donc logique qu’un tel personnage s’attache à écrire sur le domaine de Versailles* (Yvelines) et en particulier son parc qu’il considère comme « le plus beau jardin du monde ». Dans ce livre, « Versailles au temps des rois », écrit en 1934, l’historien, collaborateur de « La revue des deux mondes » et du « Figaro » et qui a influencé André Castelot et Alain Decaux, passe en revue l’histoire et la vie du domaine royal sous l’Ancien Régime au rythme de 34 chapitres, abordant tout autant la fête de Vaux-le-Vicomte* à Maincy (Seine-et-Marne), le métier de roi, la galerie des Glaces, les grandes fêtes, les repas de Louis XIV, les frasques de Louis XV, la modiste de la reine, la Révolution, l'intimité de Colbert ou encore celle de Marie-Antoinette. Mais parmi ces chroniques et histoires méconnues racontées de manière imagée et détaillée grâce à des anecdotes et à l’appui de textes d’époque, les passionnés de jardins s’intéresseront en particulier à deux chapitres. Le premier aborde les « Grandes eaux » et le second les poires de M. de La Quintinie. Pour les Grandes eaux, G. Lenotre base notamment ses écrits sur une instruction au maître fontainier Denis, à ses trois compagnons plombiers et à ses six garçons, conservée dans les archives de la maison du Roi. Dans ce texte, il est consigné « Lorsque Sa Majesté arrivera par la chaussée de l’étang, on aura soin de mettre l’eau à la Pyramide, à l’allée d’eau et au dragon et on prendra bien des précautions pour que ces fontaines aillent dans leur perfection tant que le Roi sera dans le point de vue. ». Ces écrits sont l’occasion pour G. Lenotre de revenir sur la dynastie des Francine (prononcer « Franchine » à la façon du XVIIe siècle) venue d’Italie vers 1590 et dont le dernier membre n’a pas survécu à la Révolution. Ils étaient spécialisés dans « l’art d’utiliser les eaux pour l’embellissement des parcs et jardins » et « excellaient dans la création de grottes à surprises ». Pour l’académicien, la gloire liée au parc de Versailles doit revenir à part égale entre Francine et André Le Nôtre. Au XVIIe siècle, les 23 000 muids (62 000 hectolitres) d’eau débités en une heure pour le seul plaisir royal de domestiquer la nature étaient sujets à caution de la part de certains courtisans alors qu’au même moment à Paris seuls quelques privilégiés pouvaient bénéficier d’un simple bain chez eux. Le texte précise également la valeur d’un pouce fontainier, unité de jauge équivalant à 20 m3. Il est aussi rappelé que Thomas Francine est à l’origine de l’aqueduc d’Arcueil, ouvrage d’art consacré à étancher la soif des Parisiens et ne servant plus, à l’époque où l’académicien écrit ces lignes, qu’à alimenter uniquement le seul étang du parc Montsouris* (Paris). A cette même époque, G. Lenotre signale que sur les 1400 jets prévus pour la gloire du Roi Soleil, seuls 607 étaient encore en fonction. Le second récit concerne le goût de Jean-Baptiste de La Quintinie pour les poires au sein du Potager du Roi à Versailles* (Yvelines). Il invite donc à passer la porte d’honneur attribuée au serrurier Alexandre Fordini (« un des plus beaux ouvrages de ferronnerie qui soient en France ») pour découvrir le potager dont La Quintinie fit selon lui « un chef-d’œuvre et créa une merveille » et qui en ce début du XXe siècle est « l’une de ces merveilles dont fourmille notre pays et qui sont connues des étrangers, mais que nous ignorons ». Lorsque G. Lenotre écrit ce livre, le potager comporte encore huit des poiriers plantés par La Quintinie. Ce dernier vante en particulier la variété d’hiver ‘Bon Chrétien’ tout en ayant de la peine à placer d’autres poires au second plan. Considérant qu’il dépasse Pétrarque, Jean-Jacques Rousseau ou Jean Anthelme Brillat-Savarin, G. Lenotre glorifie le style de Jean-Baptiste de La Quintinie et sa « prose succulente », auteur de deux ouvrages, le « Potager de Versailles » et « Traité du jardinage ». Il est pour lui le « La Bruyère des poires et le Saint-Simon des salades ». Pour convaincre le lecteur, il cite notamment ce texte sur son potager : « Il est nécessaire que les yeux y trouvent d’abord de quoi être content et qu’il n’y ait rien de bizarre qui les blesse ; la plus belle figure pour un fruitier ou pour un potager, est celle qui fait un beau carré, surtout quand les encoignures sont à angles droits et que la longueur excède une fois et demie ou deux fois l’étendue de la largeur. Il est certain que dans ces carrés le jardinier trouve aisément de belles planches à dresser. ». Dans un autre extrait, il mentionne les qualités attendues chez un jardinier : « Qu’on vienne à savoir premièrement qu’il est sage et honnête en toutes ses maximes de vivre, qu’il n’a point une avidité insatiable de gagner, qu’il rend bon compte à son maître de tout ce que son jardin produit sans en rien détourner, qu’il est toujours le premier et le dernier à son ouvrage… qu’il n’a pas de plus grand plaisir que d’être dans ses jardins et principalement les jours de fête… ». G. Lenotre relate les interventions du « maraîcher de Louis XIV », homme qu’il considère de la race des fonctionnaires qui tendait à disparaître, celle qui « adorait sa profession », au parc du château de Chantilly* (Oise), à Vaux-le-Vicomte, au parc du château de Rambouillet* (Yvelines) et au parc de Sceaux* (Hauts-de-Seine) et dont le talent faisait des envieux en Angleterre. Tous les autres récits de ce recueil sont aussi passionnés envers tous ces personnages historiques qui ont fait l’histoire de Versailles, et riches en anecdotes, tout en proposant un état des lieux du Versailles des années 1930. En cela, ces textes constituent un témoignage intéressant porté par un érudit sur l’un des plus célèbres fiefs de notre patrimoine national.

 

* Plus d’informations

Pour en savoir davantage sur les jardins cités dans cette notice, il suffit d’un simple clic sur les liens suivants :

Domaine de Versailles et de Trianon

Jardins de Vaux-le-Vicomte

Parc Montsouris

Le Potager du Roi

Parc du château de Chantilly

Parc du château de Rambouillet

Parc de Sceaux



© Conservatoire des Jardins et Paysages / avril 2010

 
266 pages - 9.00 €
     
   
   
   
 
   
 
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