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Expression paysagère, création française

   
Auteur : Direction éditoriale de Chien Chia-Ling
Editeur : ICI Interface
Date de dépôt : décembre 2007

En matière de paysage, la France est riche en concepteurs ingénieux innovants ayant fait leur preuve. Cet ouvrage bilingue (français et anglais) des éditions Ici interface s’attache à dresser une liste et des portraits de la scène française de l’aménagement paysager, développée non seulement en France, mais aussi à l’étranger. Contrairement à d’autres livres sur cette thématique, celui-ci a le mérite de présenter des concepteurs qui n’ont pas toujours l’honneur de publications. Ainsi, sont à l’honneur : Acanthe (Guillaume Geoffroy-Dechaume †), Agence APS (Hubert Guichard, Jean-Louis Knidel et Gilles Ottou), Erik Borja, Bruel & Delmar, Gilles Clément, Philippe Coignet, Michel Corajoud, Jacques Coulon, Michel Desvigne, Christophe Girot, Agence HYL (Pascale Hannetel, Arnaud Yver et Christophe Laforge), Ilex (Guerric Péré et Martine Rascle), In situ (Emmanuel Jalbert et Annie Tardivon), Thierry Jacquet, Linda Leblanc, Jérôme Mazas, Florence Mercier, Catherine Mosbach, Mutabilis (Juliette Bailly-Maître, Ronan Gallais et Marion Guermonprez), Jacqueline Osty, Christine et Michel Péna, Laure Quoniam, Jacques Simon, Agence Ter (Henri Bava, Michel Hoessler et Olivier Philippe), TN Plus (Bruno Tanant et Jean-Christophe Nani) et TUP (Philippe Thébaud et Marcel Baerfuss).

Dans la préface, Bernard Welcomme, directeur de l’Ecole Nationale Supérieure du Paysage de Versailles (Yvelines), rappelle que ce que l’on attend des paysagistes « est de redonner du sens à ce qui n’en a plus guère, faire émerger un renouveau dans le dialogue entre la nature et l’homme. Ce dialogue est trop souvent interrompu, mal compris ou négligé par l’homme lui-même. ». Pour ces concepteurs, le dialogue est indépendant des échelles. En effet, leurs actions concernent aussi bien la cour d’un immeuble que des paysages de plusieurs hectares. Leurs champs d’actions sont donc des sites, parcs, jardins publics, espaces publics urbains, jardins privés… Ainsi, ce livre présente la diversité de l'aménagement paysager français. Dans cette démarche, les quelque 75 projets et réalisations présentés sont classés suivant quatre chapitres traitant respectivement paysage et site, parcs et jardins publics, espaces publics urbains, jardins et espaces paysagers privés. Chaque projet est exposé avec une introduction liminaire précisant le concepteur (avec sa photo d’identité noir et blanc), sa localisation géographique, sa date de réalisation, sa superficie et le maître d’ouvrage correspondant. Sur les pages suivantes, de nombreuses illustrations (photographies, vues aériennes, plans, coupes, maquettes d’étude, photomontages…) légendées accompagnent une présentation détaillée de chaque site sur environ six pages. A chaque fois, un texte explicatif précise le contexte, la commande, le concept, mais aussi la technique comme le choix des matériaux (acier Corten, bois, gabions, platelages schiste gris…), les végétaux employés (aulnes, copalmes d’Amérique, érables, euphorbes, fougères, iris des marais, peupliers, pins, saules, savonniers, typhas, vivaces…), comme l’importance de la lumière (l’éclairage nocturne) et de l’eau sous toutes ses formes (canaux, brumes, jets d’eau jaillissant directement d’un sol minéral…), sans oublier des tendances (écologie, prairies fleuries, pas japonais, serrurerie décorative, pergolas, joints enherbés…). Si ce livre permet non seulement d’apprécier des réalisations, les différents rendus sélectionnés (esquisses, plans, coupes, perspectives, maquettes…) permettent de comprendre la façon de travailler des paysagistes, architectes et urbanistes.

Au sein des références choisies, ont été retenues quatre réalisations du président de notre association, Philippe Thébaud : le parc des Bruyères à Bois-Colombes (Hauts-de-Seine), le jardin des Tournelles à Courbevoie (Hauts-de-Seine), l’avenue du Siècle et la place Centrale à Shanghai (Chine) et les jardins du Méridien* à Nouméa (Nouvelle-Calédonie). En prenant en compte la flore, la géologie et les atouts culturels, ces derniers reflètent la diversité et l’originalité du patrimoine végétal néo-calédonien. Dans un cadre végétalisé, une rivière aux berges luxuriantes se fond avec la piscine près d’un faré (habitation traditionnelle). Dans les carrés botaniques, une collection de palmiers est à découvrir grâce aux fiches botaniques disponibles à la réception de l’hôtel et téléchargeables sur notre site.

Parmi les exemples choisis au titre du paysage, figure notamment le travail de Jacques Simon et en particulier ses différentes interventions comme ses sculptures et silhouettes réalisées en gaulettes de châtaignier ou d’osier comme dans le parc de la Deûle (Nord). Cet « enfant terrible » du monde du paysage, primé en 1990 par le Grand prix du Paysage et une seconde fois en 2006 (en association avec Yves Hubert de JNC International), est aussi connu pour ses dessins et textes inscrits dans les champs (à découvrir en photographies ou vus du ciel) selon son propre concept de l’« articulture ». Ce terme dont il est l’auteur avec Laurette Valleix (Espace Naturel Lille Métropole) est issu de la contraction des deux mots art et agriculture, considérant la nature comme une boîte de couleurs. Inscrit au sein du patrimoine mondial de l’humanité de l’UNESCO, le site prestigieux et historique du Pont du Gard (Gard) a fait l’objet d’un réaménagement en 2001 par Laure Quoniam. Elle a imaginé de protéger le site de 60 hectares grâce à un périmètre entièrement piétonnier et en modifiant l’implantation des parkings, suivant un projet à vocation muséographique, scientifique, touristique et paysagère, accueillant 2 millions de visiteurs par an.

Ce livre laisse bien évidemment une large place pour de nombreux parcs et jardins publics comme le parc départemental de la Plage bleue à Valenton (Val-de-Marne) [Ilex qui a reçu le trophée du paysage en 1993], qui a été imaginé comme la sculpture d’un paysage ingrat (ancienne gravière de 50 hectares et décharge) pour constituer aujourd’hui un repère de référence dans la plaine de Créteil. L’agence Ilex a aussi à son actif le parc naturel urbain de la Feyssine à Villeurbanne (Rhône), forêt alluviale de 45 hectares, à la fois espace d’observation de la nature libre et lieu urbain ouvert (prairie aux orchidées, plages urbaines…). Des oiseaux des 4 continents (aras Hyacinthe, condors des Andes, flamants de Cuba, ibis rouges, manchots de Humboldt, nettes rousses, pélicans…) vivent en semi-liberté dans le parc des Oiseaux à Villars-les-Dombes (Ain), toujours dû à Ilex, dans un site mêlant les paysages exotiques à celui des Dombes. Le parc zoologique de Paris (bois de Vincennes) est un autre parc animalier dont le réaménagement est programmé en 2009-2010 d’après le projet lauréat d’un concours remporté par TN Plus. Dans celui-ci, les cages disparaissent afin que ce soit l’homme qui soit invité chez l’animal et non le contraire. Toujours dans le domaine animalier, la Plaine Africaine du jardin zoologique du parc de la Tête d’or* à Lyon (Rhône) [Jacqueline Osty] est un aménagement s’intégrant remarquablement dans le cadre du parc du XIXe siècle, avec son étang, ses plantations de graminées et sa giraferie résolument contemporaine, de forme ellipsoïdale tout en bois. A proximité du Pont de Saint-Nazaire, prend place le jardin botanique de Mindin à Saint-Brevin-Les-Pins (Loire-Atlantique) [Jacques Coulon et Linda Leblanc], avec une ambition botanique sur un site occupé par un blockhaus et devant être complété par une serre. Les plantes sont aussi à l’honneur dans le jardin botanique de Bordeaux (Gironde) [Catherine Mosbach], structuré suivant trois grandes vocations : exotique, ethnobotanique et écologique. Le parc du Chemin de l’île à Nanterre (Hauts-de-Seine) [Acanthe et Mutabilis] montre comment une ancienne friche à la croisée d’une autoroute et d’une ligne de RER peut devenir une référence en terme de développement durable. En témoignent les jardins filtrants qui y ont été aménagés par Thierry Jacquet. Le parc de la Seille à Metz (Moselle) [Jacques Coulon et Laure Planchais], situé à proximité du futur centre Pompidou-Metz, est axé sur le thème de l’eau : roselière, lagunage, bassin d’orage, prairies humides et emploi du génie végétal pour tenir les berges. De plus, houblonnière, vignes et mirabelliers affirment une référence aux cultures lorraines.

Les espaces publics urbains sont aussi au cœur de la réflexion des concepteurs comme en témoignent ceux de la ZAC de la Morinais à Saint-Jacques-de-La-Lande (Ille-et-Vilaine) [Bruel & Delmar], mais aussi le Cours des 50 otages et l’Ile Feydeau à Nantes (Loire-Atlantique) [Bruno Fortier], deux espaces majeurs de la rénovation du centre de la ville.Surplombant le parc Jouvet*, le Champ de Mars de Valence (Drôme) [Agence APS] est une esplanade organisée autour du kiosque de Peynet avec des jardins linéaires plantés d’arbustes et de vivaces soulignés par des jets d’eau.Les berges sont aussi en plein cœur des sites à requalifier, à l’instar de celles de la Seine à Epinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis) [Florence Mercier], aménagées avec des terrasses et pontons en crête afin de profiter des vues sur le fleuve tout en remédiant à l’érosion des berges.

Enfin, des jardins et espaces paysagers privés ont été retenus pour montrer dans quelle mesure la créativité pouvait aussi s’y exprimer. Les jardins du siège social de la RATP (Régie Autonome des Transports Parisiens) [Laure Quoniam] en sont un bon exemple : le jardin d’eau intérieur est basé sur la représentation du logo de la RATP, quant au plan de son réseau et la Seine, ils sont illustrés respectivement par une mosaïculture, une mosaïque en onyx et un bassin avec écluse. Les jardins de la Croix des Archers à La Gacilly (Morbihan) [TN Plus] symbolisent les liens entre la société Yves Rocher et le monde végétal. Le jardin de la station d'épuration à Caen (Calvados) [Thierry Jacquet] est né de la transformation d’une zone polluée en parc public grâce au concept de « jardins flottants » à partir de filtres naturels.

Parmi les sites les plus emblématiques figurent notamment les jardins du domaine de Charance* à Gap (Hautes Alpes) [Bruel & Delmar] établis sur 4 terrasses abritant la collection de roses du conservatoire botanique alpin. Celles-ci sont respectivement plantées de houx, de buis et roses, de daphnés et roses et de graminées dans un décor animé par des grottes et des jeux d’eau.

D’autres aménagements sont à l’honneur. Ainsi, le parc des Cormailles à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) [Agence Ter], constitué d’« îles jardins », est emprunt d’un vocabulaire historique (le « ha-ha ») et d’une contemporanéité (mâts brumisateurs), tout en évoquant la vallée de la Seine (jardin des Sables, canal…).

Le parc de la Théols à Issoudun (Indre) [Michel Desvigne], également connu sous le nom de « parc François Mitterrand », avec ses rangs d’iris et ses lignes de saules en contrebas de la Tour blanche (1195 à 1202), souligne le tracé du parcellaire médiéval. Le jardin Atlantique* (Paris) [Christine et Michel Péna] est édifié sur la dalle couvrant les voies de la gare Montparnasse. Il évoque l’Atlantique en opposant notamment de part et d’autre de l’axe central passant par l’île des Hespérides les arbres du Vieux continent à ceux du Nouveau monde. Le parc de Beauregard à Rennes (Ille-et-Vilaine) [Agence HYL] a été aménagé au cœur d’un futur quartier et met en scène la course du soleil (prismes de verre, horloge solaire…). Le parc Saint-Pierre à Amiens (Somme) [Jacqueline Osty, pour lequel elle a obtenu le « Prix du paysage 2005 »] relie les Hortillonnages au centre ancien, tout en étant un parc aquatique et végétalisé, traversé par trois rieux, très apprécié des Amiénois pour les loisirs ou la détente. Le parc de Gerland à Lyon (Rhône) [Michel Corajoud], avec pour ambition d’être un parc actif et populaire, est composé d’une grande prairie de 7 hectares et de la mégaphorbiaie (groupement luxuriant de hautes herbes) prenant la forme d’un jardin linéaire rassemblant 300 types de végétaux différents. D’une superficie de 30 hectares, le parc Jean Moulin - Les Guilands à Bagnolet (Seine-Saint-Denis) [Christine et Michel Péna] est issu de parcelles disparates réunies par une grande bande engazonnée de 40 mètres de large et longue de 600 mètres. Il comprend en outre un étang, un escalier-fontaine reliant le haut du parc à la ville et des pontons de bois traversant la friche. Le parc des Lilas à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne) [Florence Mercier] est caractérisé par un remarquable canal de fleurs. Dans un projet dont l’aménagement est différé, le jardin d’Acclimatation (Paris) [Laure Quoniam] devrait comporter un espace de jeux dans une ambiance d’exotisme afin de revenir à la notion d’acclimatation des plantes à l’origine du nom du site, avec des plantes géantes (houblon, tournesol, gunnères…). Quant au jardin du musée du Quai Branly (Paris) [Gilles Clément], avec ses sentiers et petites collines, il propose en accord avec le thème muséal une invitation au voyage. Il comprend un théâtre de verdure, des bassins et une élégante clôture évoquant un enchevêtrement de roseaux devant le musée signé de Jean Nouvel. Par ailleurs, les jardins sont aussi parfois ceux des paysagistes eux-mêmes à l’instar des Clairmonts, le jardin d’Erik Borja à Beaumont-Monteux (Drôme).

Ainsi, les domaines d’intervention dans le monde du paysage sont nombreux et variés : aires d’autoroutes, parcs, routes, places publiques, parcs zoologiques, jardins botaniques, avenues, parvis, espaces verts publics et privés, sites classés, parcs de châteaux, berges, reconversions de friches industrielles. Cet ouvrage démontre combien non seulement la palette des paysagistes est étendue, mais surtout toute la diversité des problématiques sur lesquelles ils sont susceptibles d’intervenir. Parmi les aménagements les plus originaux figure notamment le jardin expérimental du Ministère de la Culture à Paris [Michel Desvigne] qui, grâce à l’aide du botaniste chercheur Patrick Blanc, représente une micro-forêt australe de Nouvelle-Zélande et de Tasmanie.

Cette création française s’exporte aussi à l'étranger à l’instar de plusieurs aménagements présentés comme le parc Fiat O.M. à Milan (Italie) [Christophe Girot], l’avenue du Siècle et la place Centrale à Shanghai (Chine) [TUP], le jardin de l'Université Keio à Tokyo (Japon) [Michel Desvigne], le jardin « Floor Works » à Genève (Suisse) [Agence Ter] ou encore la place Jean-Ernest Laforce à Montréal (Canada) [Ilex]. Cette dernière est une forêt urbaine animée de signes et sculptures de Jean-François Gavoty. En effet, les sculpteurs sont aussi des partenaires privilégiés des concepteurs à l’instar d’Yvan Theimer au jardin des Tournelles à Courbevoie.

Au fil des projets, la création contemporaine est dévoilée avec ses préoccupations actuelles comme le respect de la biodiversité, l’éclairage nocturne, les projets HQE (Haute Qualité Environnementale), l’utilisation de massifs de graminées, l’emploi du bois comme matériau, le traitement des berges ou encore la récupération de l’eau de pluie. Jets d’eau, jeux originaux (comme les « nids cabanes » du parc du Chemin de l’île à Nanterre) ou création de jardins familiaux sont des tendances qui se retrouvent dans plusieurs des projets sélectionnés au sein de cet ouvrage. Avant tout, il ressort que ces jardins et espaces publics sont des scènes de vie (orchestre jouant en bottes en caoutchouc dans un bassin des berges du Rhône à Lyon, des jeux d’enfants, des joggeurs, des boulistes…).

En annexe, les paysagistes mis à l’honneur au sein de l’ouvrage sont présentés individuellement grâce à une biographie de quelques lignes avec les coordonnées des agences y compris leurs sites Internet. Outre ces concepteurs de jardins, quelques architectes et urbanistes ont été retenus pour leur travail sur le monde du paysage : Arte Charpentier, Bruno Fortier, Atelier Ruelle, David Serero et François Tribel. Le monde professionnel français en matière d’expression paysagère est des plus créatifs. Ce livre, dressant un véritable état des lieux de la conception paysagère française, en démontre le savoir-faire, les compétences, l’inventivité, mais aussi la pertinence des réponses des paysagistes lors de concours et la maîtrise d’un métier dans le cadre de la prise en compte du paysage en relation avec les liens et préoccupations sociales. Les paysagistes et concepteurs savent aussi comment articuler et associer la nature à la culture. Ainsi, le génie du lieu est assurément transcendé.

Il est à noter, également présentés sur ce site, deux autres ouvrages des éditions Ici interface liés au thème de la création paysagère, « L’eau en forme et lumière » de Jean Max Llorca - JML Consultants et « Jardins créatifs Chaumont-sur-Loire, festival international des jardins 1992-2008 » de Sophie Barbaux.

* Plus d’informations

Pour en savoir davantage sur les jardins cités dans cette notice, il suffit d’un simple clic sur les liens suivants :

Jardins du Méridien

Parc de la Tête d’or

Parc Jouvet

Domaine de Charance

Jardin Atlantique



© Conservatoire des Jardins et Paysages / novembre 2008

 
452 pages - 68.00 €
     
   
   
   
 
   
 
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